Message provisoire
Je l’ai déjà souvent raconté, le grand rêve de ma vie c’était d’avoir des enfants, beaucoup d’enfants, cinq, six, treize. L’homme comptait peu dans mon rêve, l’homme ne comptait même pas du tout, puisque je n’envisageais pas de vie de couple. Amoureuse oui, avec le cœur qui bat à toutes volées et les chagrins qui vont avec – je n’ai jamais aimé ou été aimée autrement. Mais un homme dans ma vie chaque jour que Dieu fait ? Non, je ne voyais pas les choses comme ça.
Aujourd’hui j’ai trois enfants, mais pas de famille. Qu’est-ce que j’ai fabriqué ? Comment ai-je pu, de ce rêve qui me tenait tant à cœur, faire un tel gâchis ? Je n’ai rien construit, peut-être parce que pour construire, il vaut mieux être deux (même si, comme chacun sait, on est toujours seul)(ceci étant, seul à deux, c’est quand même plus sympa).
Évidemment, la seule personne qui aurait pu changer quelque chose, c’est moi. Aurais-je dû ne pas me marier avec le père de mes filles ? Aurais-je dû ne pas avoir mes filles, en tout cas pas avec cet homme-là, si jeune, si immature, si qui ne voulait pas d’enfant ? Pourquoi l’ai-je choisi, lui? (puisqu’il paraît que l’on choisit toujours, même si franchement, j’ai plutôt eu l’impression d’avoir été happée dans une nasse inextricable). Est-ce cela que je dois comprendre ? Mon plan était foireux dès le début? Pourquoi n’ai-je pas rêvé d’être bonne sœur ?
Être parent ne s’apprend pas, il n’y a pas de permis pour ça. Être bon parent encore moins. On fait ce qu’on peut, du mieux qu’on peut, seulement parfois le mieux c’est seulement le moins pire du pire.
Aujourd’hui j’ai trois enfants, et je remercie Dieu et tout ce qui est priable d’avoir protégé tous ceux qui ne me sont pas nés. Toutes celles, pardon. Assez bizarrement, ce n’était que des filles.
La vie veut absolument que je me détache systématiquement de tout ce à quoi je suis attachée. Pourquoi ? Je n’en sais rien. On va dire que c’est mon karma. On va dire que ça t’apprendra à aimer trop, tiens ! Même si je n’ai jamais compris ce que ça pouvait bien être, aimer trop.
Ça donne quoi alors, d’aimer "pas assez" ? On se garde un bout du cœur pour soi, on distribue au compte-goutte, ou bien ?